La cession de droit au bail est capitale pour les parties liées par un bail commercial.
Ce dossier vise à présenter un panorama clair et pédagogique pour déterminer les contours de cette opération complexe.
Pour ce faire, le cadre de la cession de droit au bail mérite d’être défini afin de comprendre les règles formelles qui accompagnent cette opération.
En ce sens, le contenu de la cession au bail sera exploré par le biais des clauses essentielles à inclure dans l’acte.
Nous terminerons par aborder les effets de la cession de droit au bail sur l’interaction entre les parties : le cédant, le cessionnaire et le bailleur.
La cession de droit au bail est capitale pour les parties liées par un bail commercial.
Ce dossier vise à présenter un panorama clair et pédagogique pour déterminer les contours de cette opération complexe.
Pour ce faire, le cadre de la cession de droit au bail mérite d’être défini afin de comprendre les règles formelles qui accompagnent cette opération.
En ce sens, le contenu de la cession au bail sera exploré par le biais des clauses essentielles à inclure dans l’acte.
Nous terminerons par aborder les effets de la cession de droit au bail sur l’interaction entre les parties : le cédant, le cessionnaire et le bailleur.
Qu’est-ce que le droit au bail ?
En vertu de l’article L. 142-2 du Code de commerce, le droit au bail est un élément du fonds de commerce. Ce droit désigne la jouissance du local commercial où est exploité le fonds ainsi que le droit au renouvellement à l’issue de la période de jouissance temporaire
Qu’est-ce qu’une cession de droit au bail ?
La cession de droit au bail peut s’opérer aussi bien à titre onéreux qu’à titre gratuit. Elle se définit comme étant un acte juridique par lequel le cédant (locataire sortant), bénéficiaire du bail initial, va transmettre ses droits à une tierce personne, appelée cessionnaire.
Le cessionnaire sera soumis aux mêmes droits et obligations que ceux du cédant visés au sein du bail objet de la cession.
La liberté de cession à l’acquéreur du fonds
L’Article 1717 du Code civil pose le principe de la liberté de cession du bail par le locataire si cette faculté ne lui a pas été interdite.
Néanmoins, l’article L. 145-16 du Code de commerce admet que les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail ou les droits qu'il tient en matière de renouvellement à l'acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise sont réputées non-écrites.
Ainsi, il résulte de ces dispositions que le régime diffère selon que l’opération visée constitue une cession de droit au bail ou cession de fonds de commerce.
La cession du droit au bail n’est possible que sous réserve de l’obtention préalable de l’agrément du bailleur. A l’inverse, en matière de cession de fonds de commerce, le principe demeure celui de la liberté.
Des formalités obligatoires doivent être respecter pour valider la cession de droit au bail entre le cédant et le cessionnaire.
Un état des lieux préalable
D’après l’article L. 145-40-1 du Code de commerce, lors de la prise de possession des locaux, un état des lieux doit être établi contradictoirement et amiablement par le bailleur, le locataire ou un tiers mandaté par ces derniers. L’état des lieux est à joindre au contrat de location ou à défaut à conserver par chacune des parties.
L’Enregistrement au service des impôts aux entreprises compétent
L’acte portant cession de droit au bail doit obligatoirement être enregistré auprès du service de Publicité foncière et de l'Enregistrement (SPFE) / service départemental de l'Enregistrement (SDE) dans un délai d’un mois à compter de leur date.
La signification de la cession au bailleur
S’agissant d’une cession de créance, la cession de droit au bail doit être signifiée au bailleur au regard de l’article 1690 du Code civil.
En l’absence de respect des mentions de l’article 1690 du Code civil, la cession n’est pas nulle mais ne peut être opposée aux tiers et donc au bailleur (sauf à ce que la nullité soit prévue par le bail).
Cette signification doit avoir lieu quand bien même la cession du droit au bail s’effectuerait au profit de l’acquéreur du fonds de commerce.
Le défaut de signification rendra donc le bail inopposable au bailleur qui pourra en refuser le renouvellement au cessionnaire sans lui verser une quelconque indemnité ; libre à lui de demander également la résiliation du bail.
Des clauses essentielles permettent d’encadrer la cession du droit au bail, nous en présenterons les principales.
La clause d’agrément au profit du bailleur
Très souvent présente au sein des baux, la clause d’agrément vise à obtenir l’agrément préalable du bailleur à la cession en fonction de divers critères (honorabilité, solvabilité ou autres compétences du cessionnaire).
Cette clause ne doit pas interdire toute cession.
Aussi, le bailleur ne peut pas refuser l’agrément de façon discrétionnaire. Les motifs de refus d’agrément sont soumis au contrôle judiciaire, comme rappelé par un récent arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 9 mai 2019 : « la cour d’appel, qui a constaté que la propriétaire notifiant son refus à la locataire, n’alléguait aucun motif à l’appui de celui-ci, a pu, sans ajouter au bail, en déduire que ce refus était constitutif d’un abus justifiant l’indemnisation du préjudice causé ».
Les clauses relatives à la forme de la cession
Les clauses soumettant la cession au respect de certaines formalités telles que la clause prévoyant l’intervention du bailleur à l’acte, celle soumettant la cession du bailleur à son autorisation préalable ou encore celle exigeant la constatation de l’acte par un acte authentique sont licites. Elles permettent au bailleur de contrôler la régularité de la cession.
Les clauses relatives au droit de préemption au profit du bailleur
En cas de cession du droit au bail ou du fonds de commerce, le bail commercial peut comporter une clause qui stipule que le bailleur disposera d’un droit de préemption par rapport aux autres candidats acquéreurs.
Le droit de préemption des communes
L’article L. 214-1 du Code de l’urbanisme confère aux communes un droit de préemption sur les fonds de commerce, les fonds artisanaux et les baux commerciaux dans le périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité.
Avant toute cession de bail ou de fonds de commerce ou artisanal, il appartient aux parties de se renseigner auprès de la mairie de la commune concernée afin de savoir s’il existe ou non un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité.
L’irrégularité de la cession
La cession du droit au bail irrégulière peut entraîner différents types de sanctions parmi lesquelles l’inopposabilité de la cession et l’extinction du bail commercial. Par ailleurs, il est toujours possible de procéder à une régularisation de la cession.
Les sanctions d’une cession irrégulière
Concernant l’inopposabilité de la cession, elle peut provenir du non-respect des formalités de signification prévu à l’article 1690 du code civil ou du non-respect des stipulations contractuelles.
Concernant l’extinction du bail commercial, cette sanction peut être obtenue à la suite de la résiliation du bail et du refus du renouvellement du bail.
La résiliation du bail peut, par exemple, être obtenue de plein droit par application d’une clause résolutoire en cas de cession de bail irrégulière. Le bailleur peut également demander la résiliation judiciaire du bail en invoquant dès lors une gravité suffisante, souverainement appréciée par les juges du fond.
En outre, le bailleur peut aussi refuser le renouvellement du bail sans avoir à payer d’indemnité, s’il justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du locataire sortant.
Le cessionnaire évincé qui doit quitter les lieux après résiliation du bail ou après refus de renouvellement peut agir en responsabilité civile contre le cédant et obtenir la réparation du dommage subi.
Comment régulariser une cession de droit au bail irrégulière ?
La clause résolutoire contenue dans un bail ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux, la régularisation a posteriori est donc possible dans le délai d’un mois.
Il est fréquent que le bail comporte une clause de garantie stipulant qu’en cas de cession du bail, le cédant s’engage à garantir l’exécution des obligations résultant du bail. Cette clause prévoit souvent que le cédant et le cessionnaire sont solidairement responsables de la bonne exécution du bail envers le bailleur. La clause de garantie solidaire présente un avantage pour le bailleur lorsque le bail est cédé, celui d’être payé en cas de non-paiement de loyers.
Durée de la garantie
Pour les cessions conclues avant le 20 juin 2014
Le cédant restera débiteur solidaire du paiement des loyers pendant la durée du bail. Cette obligation prenant fin par l’effet d’un congé ou d’une résiliation. Bien que certaines de ces clauses concernent la garantie face à la défaillance de tous les cessionnaires successifs, le cédant ne sera garant de ces derniers que dans la limite de la durée du bail initial.
Pour les cessions conclues après le 20 juin 2014
La loi Pinel est venue limiter pour le bailleur sa faculté à se prévaloir d’une telle clause. En effet, aux termes de l’article L. 145-16-2 du code de commerce, le bailleur n’est plus en mesure d’invoquer la clause que durant les trois années à compter de la cession du bail.
Cet article issu des dispositions de la loi Pinel du 18 juin 2014, revêt un caractère d’ordre public (Cass. civ. 3ème, 11-04-2019, n° 18-16.121).
Obligation d’information
Pour les cessions conclues avant le 20 juin 2014
Aucune obligation d’information n’était prévue avant l’entrée en vigueur de la loi Pinel. La jurisprudence antérieure allait dans le sens de la perte totale ou partielle pour le bailleur de son recours, dans le cas où il n’avertissait pas le garant de la défaillance du cessionnaire.
Pour les cessions conclues après le 20 juin 2014
L’article L145-16-1 du code de commerce précise que si la cession du bail commercial est accompagnée d’une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, ce dernier devra informer le cédant de tout défaut de paiement du locataire dans le délai d’un mois à compter de la date à laquelle la somme aurait dû être acquittée par celui-ci.
L’article L145-16-1 ne prévoit aucune sanction en cas de non-respect de ses dispositions et il est loisible de penser que, conformément à la jurisprudence antérieure à la loi Pinel trouvera à s’appliquer. À charge pour le cédant d’invoquer le manquement à son devoir d’information du bailleur.
Étendue
La Cour de cassation interprète de façon restrictive les clauses de garantie solidaire. Elle doit être interprétée de façon stricte.
En l’occurrence, il ne pourra être demandé au cédant de régler les réparations locatives si la clause ne concerne que le paiement des loyers.
Ces clauses prennent fin en cas de congé donné au cessionnaire pour la date d’expiration du bail ou à l’expiration du bail au cours duquel la clause a été insérée. Mais, elles seront toujours valables en cas de poursuite du bail par tacite reconduction au-delà du terme contractuel.
En l’absence d’une clause de garantie solidaire, le cédant se verra libre des obligations nées du bail à compter du moment où la cession est opposable au bailleur. Seule une telle clause incluse dans le bail d’origine permettra au bailleur de se prévaloir d’une telle garantie vis-à-vis du cédant.
La cession de droit au bail et la cession de fonds de commerce sont deux droits patrimoniaux distincts. La cession d’un fonds de commerce emporte cession du bail lorsque le local loué, qui permet le ralliement de la clientèle, est essentiel à l’exploitation (Cass. Com., 26 octobre 1993) mais pas l’inverse.
Le bailleur peut-il interdire ou limiter le droit de cession du bail du locataire ?
Le bailleur ne peut inclure de clause interdisant la cession du droit au bail. Cependant, des clauses peuvent venir restreindre la faculté du locataire à céder son bail. Ces clauses peuvent par exemple prévoir une autorisation de la cession du droit au bail qu’au seul acquéreur du fonds de commerce exploité par le locataire (Article L. 145-16 du Code de commerce).
D’autres clauses visent à permettre au bailleur d’apprécier les qualités et les garanties présentées par le cessionnaire. Ainsi, une clause exigeant l’intervention du bailleur octroie à ce dernier le droit d’agréer ou de refuser le potentiel cessionnaire du droit au bail.
En sus le bailleur et le locataire peuvent insérer plusieurs clauses encadrant la cession du droit au bail.
En principe, le preneur peut librement céder le bail commercial qu’il exploite. Néanmoins, dans la pratique il est admis que le bailleur ait un droit de regard le locataire entrant.
En ce sens, de nombreuses clauses prévoient la participation du bailleur à la cession d’un bail commercial.
La clause d’agrément : l’autorisation préalable du bailleur
Lors de la cession du bail commercial, les parties peuvent prévoir d’obtenir l’accord préalable du bailleur. Des clauses restreignant le droit de céder le bail sont permises et doivent être observées avant toute cession du bail commercial.
Pour autant, ces clauses ne doivent en aucun cas entraver la faculté offerte par la loi au locataire de céder son bail à l’acquéreur du fonds de commerce. La clause d’agrément permet au bailleur d’avoir un contrôle direct sur la cession. Il s’assurera ainsi que le cessionnaire lui convient et qu’il remplit les conditions de solvabilité et de fiabilité attendues.
Si ce dernier ne remplit pas ces conditions, le bailleur dispose de la faculté de refuser la cession.
Que peut faire le locataire en cas de refus du Bailleur ?
Le bailleur ne peut discrétionnairement refuser la cession du droit au bail sans invoquer de motif légitime s’il l’a soumise à son agrément (Cass. Civ. 3ème, 15 juin 2011, n° 10-16.233).
Le locataire sera invité à agir en justice afin d’obtenir l’autorisation judiciaire de procéder à la cession en cas de refus du bailleur. Il lui est vivement déconseillé d’y procéder avant l’autorisation judiciaire car si par la suite la cession fait l’objet d’un refus de la part des juges, elle ne pourra être opposée au bailleur qui en demandera vraisemblablement la résiliation.
Dans certains cas, les juges peuvent autoriser la cession en dépit du refus d’agrément du bailleur et accorder des dommages et intérêts au locataire.
La clause d’intervention du bailleur
Le bailleur peut également stipuler au bail qu’il souhaitera être présent lors de la cession. Cette clause lui permettra de s’assurer que la cession est effectuée dans les règles et que le cessionnaire s’engage à reprendre les engagements du cédant.
Que faire face à un bailleur ne répondant pas à la demande d’intervention qui lui est adressée ?
Si le bailleur ne répond pas pour des raisons non dévoilées, il parait judicieux de le sommer d’intervenir, par huissier, et de ne signer aucune cession en attendant sa réponse. En l’absence de réponse, plusieurs options sont envisageables comme la conclusion de l’acte sous la condition suspensive d’accord postérieur du bailleur ou l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception à l’attention du bailleur afin de porter à sa connaissance à la cession à venir.
Toutefois, il est à noter que le silence volontaire du bailleur ne peut être avancé par lui pour prétendre ne pas avoir accepté le cessionnaire. En cas de cession au bail, le refus du bailleur pourrait être qualifié d’abusif s’il s’avérait qu’il conteste l’opération.
La clause instaurant un droit de préemption au profit du bailleur
Le bail peut prévoir un droit de préemption au profit du bailleur lorsque le locataire envisage de vendre son fonds de commerce.
Il appartiendra au bailleur d’user de son droit avant de procéder à toute réitération du compromis de cession et conclure ladite cession.